Technique Trapèze partie 3

Par David Hughes, équipier 470 sélectionné pour les JO RIO 2016, publié en anglais le 03/02/2016 sur Sailing World

(traduction par N.Guichet, autorisée par l’auteur).

Sortir sur la main = vitesse

Le moment critique au trapèze survient quand vous avez transmis votre poids au câble, avec votre corps étendu à l’extérieur, mais que vous n’êtes pas encore accroché. Vous êtes sur la main, c’est le cas lors des virements, empannages ou autour des bouées. Ces moments commencent ou terminent des transitions, c’est pourquoi ils sont critiques – le bateau ralentit et vous devez le re-accélérer. Votre but est de réduire le temps entre le moment où le bateau ralentit et celui où il est à nouveau à sa vitesse maximum. Ne vous occupez pas du crochet, il n’y a pas d’urgence. A la place, transférez tout votre poids au câble, faites marcher le bateau en choquant un peu, puis réglez et accrochez-vous.

Plus vous êtes impliqué dans le retour rapide à la vitesse cible, plus vous finirez vite la séquence en vous raccrochant. C’est un cycle qui se renforce tout seul.

On trouve un bon exemple de ça en 49er dans des conditions de pleine puissance. De nombreux barreurs sortent de l’empannage et se suspendent par la main un petit moment. Le concept est simple : placer le bateau sur son bon angle de sortie et tout le reste se mettra en place. Si vous tâtonnez avec le trapèze et ne prenez pas le bon angle de sortie, le temps de retour à la vitesse cible continue à courir. Le bateau se moque de savoir si vous êtes accroché ; tout ce qu’il connait c’est la vitesse et la stabilité.

Position = performance

Le coach olympique américain Luther Carpenter parle toujours de « swing weight », ce qui est un code pour demander une implication totale au trapèze : corps étendu, à plat, descendu, avec aucune excuse pour une quelconque perte de puissance. C’est de la physique élémentaire : le poids appliqué au bras de levier maximum est équivalent à la capacité d’équilibrer plus de puissance vélique. En d’autres mots, la grand-voile reste bordée plus longtemps. Poussez dans les sangles d’épaule et ne soyez pas tenté d’ajuster votre palan de trapèze alors que la seule chose vraiment nécessaire est une posture plus droite. Ne rabaissez pas votre corps s’il n’est pas complètement droit. Plus vous serez expérimenté au trapèze, moins vous touchez à sa hauteur. Rappelez-vous : « les épaules avant le palan ».

En phase d’accrochage/décrochage lors des manoeuvres en conditions de pleine puissance, maintenez la posture et amenez à vous la cuillère de trapèze, pas le contraire. En tant qu’entraîneur, ma pire bête noire est de voir des équipiers plier les genoux pendant l’accrochage. A la place, utilisez vos bras et vos abdos pour amener vos hanches à la cuillère avec aussi peu (ou pas) de flexion de genoux que possible. Si vous pliez les genoux, vous sacrifiez du bras de levier au moment où le bateau en a le plus besoin pour accélérer.

De même, ne vous pliez pas à la taille, parce qu’encore une fois, vous gaspillez de la puissance. Les flexions coïncident souvent avec un choqué des écoutes. Une posture légèrement fléchie peut sembler insignifiante, mais une fois que les cycles de flexions/choqués commencent, ça peut prendre plusieurs longueurs de bateaux avant d’y remédier.

Il y a bien des cas où le vent diminue, où l’état de la mer change, et vous ne pouvez plus longtemps est à plein trapèze – vous êtes alors en sous-puissance. La clé est de s’assurer que votre corps peut immédiatement une position parfaite. Ca se fait avec les jambes, pas avec le dos. Pliez les genoux plutôt que le haut du corps. Pourquoi ? Parce que vous redevenez plus puissant en raidissant les jambes, et vous pouvez aisément ajuster à la fois l’amplitude et le timing du mouvement. Au lieu de vous préoccuper de votre poids dans le bas du dos, votre dos est déjà raidi et prêt à passer en mode plein trapèze grâce aux jambes. Imaginez votre dos parallèle à l’eau, genoux pliés. Raidissez les jambes quand survient une rafale, et vous avez directement une excellente position du haut du corps, simplement parce que vous ne l’avez jamais quittée. Le résultat sera une réponse plus rapide aux surventes et aux molles, produisant des transitions régulières pour optimiser l’équilibre.

Quand vous combinez le moment de redressement et la position pleine puissance, l’objectif suivant est d’être le plus bas possible. Pas en-dessous de la perpendiculaire au mat, mais aussi près que possible. Particulièrement sur les dériveurs comme le 470, le trapèze en position basse ajoute de la stabilité au bateau. Le mouvement de roulis est atténué, et la verticalité du plan de voilure plus fréquente en proportion. De plus, le bateau accepte plus de pression en diminuant sa tendance à convertir le surcroît d’énergie en force latérale. L’apport de puissance est converti plus rapidement en mouvement vers l’avant. Sur le circuit olympique de 470, on appelle ça le style Français. Pour une raison quelconque, les Français sont passés maîtres dans l’art de garder leur poids en bas.

Avec une bonne position de corps et des qualités de genoux, ajoutons la géométrie du bateau. J’appelle ça la partie immobilière. Vous devez connaître de quelle surface vous disposez pour travailler. Jusqu’où pouvez-vous aller sur l’arrière ou sur l’avant ?

Pour n’importe quelle sortie en 470, la position des pieds va de juste devant les haubans à nettement en arrière de la barre d’écoute. Les équipiers de 49er connaissent bien l’acrobatie de passer du bord de l’aile à devant l’aile. Un mouvement vers l’avant dans une molle est aussi efficace que de remonter son corps avec le palan de trapèze. Un mouvement vers l’arrière dans une rafale est aussi bon que de se descendre. Ces mouvements à l’intérieur de votre terrain -depuis la navigation en déplacement (archimédienne), planing mou et planing- permettent au bateau d’avancer à son meilleur rythme. Un positionnement statique au trapèze provoque le contraire, ralentissant le bateau et conduisant même à gêner les accélérations. Avec une bonne dynamique, vous pouvez stopper le cercle vicieux de se remonter dans les molles, puis d’être surpris trop haut par la rafale suivant.

Tout est dans l’équilibre

En dépit des changements constants, les forces sur votre corps devraient majoritairement être en équilibre. Un trapèze déséquilibré amène des réactions tardives et finalement de la fatigue. Sachez trouver votre point d’équilibre, sachez trouver le point où la puissance du bateau vous attire, et centrez les deux. On entend souvent les marins dirent qu’ils « sentent le bateau dans le fond de leur pantalon ». Pour les équipiers, il s’agit de sentir le bateau dans les pieds. Avez-vous besoin de plus de puissance ? Déplacez-vous vers l’avant. Avez-vous assez de puissance et ressentez-vous le besoin de libérer le bateau ? Déplacez-vous vers l’arrière. Si il y a trop de tension ou de pression sur une jambe, alors vous combattez le bateau. Détendez-vous et repositionnez-vous. Un bon test pour savoir où se mettre sur le liston est se mettre sur un seul pied et d’être toujours en équilibre. Ca ne marche pas ? Alors vous êtes au mauvais endroit ou pas assez baissé sur le palan de trapèze.

David Hughes, ancien coach olympique de 49er, champion d’Europe 2015 de 470, médaille de bronze à l’Européen 2016, vainqueur de plusieurs épreuves de la World Cup 470, sélectionné américain pour les Jeux Olympiques de Rio 2016 avec le barreur Stuart McNay. Retrouvez-les sur mcnayhughes.com.

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